Protection
civile
Norcia,
Italie (9-16 septembre 2016)
Depuis que nous avons acheté la Torraccia prés de Massa Martana en Ombrie, au centre de l'Italie, en 1984 nous y avons
“vécu” deux tremblements de terre importants:
- 12 mai 1997: magnitude 4,5 Richter, dont l'épicentre était à Massa Martana
- 24 aout 2016: magnitude 6 Richter, épicentre à Accumoli (70 km de la maison à vol d'oiseau)
qui nous ont vraiment secoués au propre et au figuré. Ceux-ci ont fait trembler la maison, tomber cadres et lampes de
chevet. Celui d'aout 2016 fut impressionnant par sa durée: 142
secondes, une éternité, et ce à 03:30!
Vu la fréquence de ces phénomènes sismiques je suivis en 2015 les
cours de la protezione civile à Massa Martana pour pouvoir prêter main forte aux équipes de secours en
cas de désastres naturels. Entre autres le role de la protezione civile est d'aider les
populations frappées de calamités naturelles à surmonter les difficultés
causées par ces accidents. Mais mon activité au sein du groupe fut limitée à un rôle de gardien
de parking lors des fêtes locales pendant l'été 2015, après quoi
j'exprimais mon intention de cesser ma participation si le rôle de
la protezione civile se résumait à ce genre d'activité!
Pendant la nuit du 23 au 24 aout 2016 deux très fortes secousses
sismiques (6,1 et 5,3 Richter) à une heure d'intervalle, la première
de plus de 2 minutes (c'est TRES TRES long!) nous réveillèrent et je réalisais immédiatement qu'en
tant que volontaire de la protezione civile j'allais être
appelé à aider les victimes de ce tremblement de terre.
Effectivement quelques jours plus tard je fus appelé pour une
mission d'aide du 9 au 16 septembre à Norcia, ville déjà victime
d'un tremblement de terre en 1997 et surtout connue pour son excellent
prosciutto et autres produits de charcuterie.
Les premiers jours après un tremblement de terre sont frénétiques:
il s'agit de retrouver les personnes ensevelies le plus rapidement
possible, un travail très dangereux à cause des secousses
secondaires qui affaiblissent des structures déjà fragilisées et
ce alors que les infrastructures (communication, électricité, eau,
etc) ont été détruites ou fort endommagées. C'est un travail de
spécialistes principalement entrepris par des équipes cynophiles et par les pompiers, aidés de la population locales. Les
volontaires comme moi ne sont pas entrainés à déblayer les ruines
ou retrouver les personnes ensevelies.
Les villages touchés sont débordés et leurs infrastructures
(sanitaires, logements, etc..) peuvent rarement suffire aux besoins
de la population et encore plus difficilement à ceux des volontaires
qui affluent, il est donc frequent de voir les volontaires
individuels “refoulés” quand ils se présentent seuls pour aider
(comme Rémi en a fait l'expérience). La protezione civile
fournit les infrastructures nécessaires (logement, sanitaires,
electricité, etc.) non seulement à la population locale mais aussi
à tous ses volontaires pour éviter de créer une surcharge aux
infrastructures locales.
notre équipe sous la tente |
notre tente |
le campement |
notre tente |
A notre arrivée à Norcia nous nous présentons au centre de
commandement de la protezione civile parmi une foule de
pompiers avec leur matériel, d' infirmiers et docteurs de la croix
rouge italienne, de membres de la police locale, de carabiniers,
gardes forestiers et bien d'autres équipes, le parking ressemble à
une exposition de véhicules de secours: grues, longues échelles, pick-ups, containers, ambulances, etc..
Le building choisi sert de centre d'accueil pour les équipes de
volontaires, pour les personnes sinistrées, de salle de réunion, de
dortoir, mais bien que donnant une impression de désordre on sent
que le travail s'accomplit relativement efficacement et logiquement.
centre commandement protezione civile Norcia |
Les sinistrés sont logés soit sous des tentes soit dans un gymnase
sur des lits de camp: 100-120 personnes, enfants, vieillards sans
aucune intimité, des sanitaires consistants en 1 WC et 2 douches
pour les hommes et la meme chose pour les femmes. Les repas sont pris
à une cantine temporaire où les volontaires mangent aussi;
nourriture adéquate mais sans plus. Ceci alors qu'ils ont perdu leur
maison ou qu'elle a été déclarée dangereuse, sans savoir ce que
leur réserve l'avenir. Difficile à gérer malgré l'assistance
psychologique qui leur est offerte. Le pire est que beaucoup d'entre
eux ont vécu la meme chose lors du tremblement de terre de 1997 dans
cette meme ville de Norcia
à la cantine |
notre coordinateur |
que d'eau, que d'eau! |
spaghetti pesce di mare |
Notre premier travail consiste à sortir le matériel (bancs, bureaux
et livres) d'une école primaire déclarée dangereuse avec
l'assistance des pompiers. Travail qui doit s'effectuer par les
escaliers pour éviter d'être bloqué dans l'ascenseur en cas de
secousses. Ensuite montage des tentes (gonflables) qui serviront de
salles de classe pour les enfants et installation des bancs et
bureaux à l'intérieur.
Ces tentes sont lourdes et malaisées à déplacer mais heureusement
se gonflent par compresseur et générateur, difficile d'imaginer un
gonflage à main mais la pompe est fournie en cas d'absence de
courant!
A l'intérieur l'odeur de plastique est très forte et la température
monte rapidement sous le soleil de midi, je ne sais pas comment
feront les élèves et professeurs pour rester plus d'une heure à
l'intérieur!
montage des tentes gonflables |
montage des tentes |
pliage des tentes |
La protezione civile est sous l'autorité du maire de la
ville. en cas de tremblement de terre celui-ci requiert immédiatement
l'installation de plusieurs tentes pour y loger les personnes (entre
6 et 8 par tente) qui ne veulent pas dormir chez elles, que ce soit
par peur, ou par nécessité, si leur maison est déclarée
inhabitable. C'est lui qui décide du nombre de tentes. Notre rôle
est de monter ces tentes et après l'urgence de les démonter.
Là est un premier problème: dans la plupart des camps ces tentes
sont sous-utilisées, j'entend par là que les personnes y passent
une nuit ou deux et ensuite, rassurées, retournent dormir chez
elles. Par exemple à Cascia, ville célèbre pour sa basilique de
sainte Rita, 12 tentes avaient été installées mais 4 auraient
probablement suffit et 2 semaines après le tremblement de terres
aucune n'était plus occupée.
Notre rôle était donc de fermer ce camp, replier lits et
couvertures, démonter les tentes et de tout remettre dans des
containers pour être envoyer à un centre où le matériel sera
nettoyé, désinfecté et vérifié.
démontage à Cascia |
repos |
l'auteur au repos (encore!) |
Au centre d'accueil de Norcia pour personnes âgées et/ou
handicapées nous avons démonté un camp de tentes où chaque tente
accueillait des lits d'hôpital pour les malades en cas de dommages
aux édifices (ce qui ne fut heureusement pas le cas), ces lits sont
LOURDS et incommodes à déplacer de meme que les tentes gonflables,
donc un travail physiquement lourd et vite fatiguant, malgré des
équipes nombreuses (8 volontaires) et bien entrainées.
A Castellucio au milieu d'un plateau sous le Monte Vettore le village
a été durement touché et nous avons démonté les tentes qui là
aussi avaient peu servi; sentiment étrange de se trouver à
Castellucio où j'organise chaque année une randonnée VTT autour du
Monte Vettore. Évènement prévu cette année le 28 aout mais que
j'avais du annuler suite au tremblement de terre du 24 aout. Pendant
notre activité il passait régulièrement des touristes aussi bien
italiens qu'étrangers, mais l'accés à la zone rouge, là où les
édifices se sont écroulés leur était interdite. Difficile de dire s'ils venaient voir les dégats ou étaient simplement de passage.
démontage à Castellucio |
La route d'accès à Castellucio est interdite à la circulation civile du aux eboulements causés par les secousses.
eboulements sur la route de Castellucio |
Le dernier jours alors que nous déplacions des meubles dans une
école, de nombreuses secousses (3,9 Richter) eurent lieu, tout le
monde se précipite dehors et s'éloigne des édifices (pour éviter
les chutes de tuiles et autres pierres). De retour à Norcia toute la
population est dans la rue et les pompiers sont sur leurs échelles à
vérifier les èdifices. Le soir dans les rues du centre beaucoup de
personnes se promènent, elles ont peur de rentrer chez elles, les portes des
immeubles sont ouvertes pour éviter qu'elles ne se bloquent et que
les habitants soient coincés à l'intérieur. En parlant avec les
résidents on sent une détresse profonde surtout due à
l'incertitude et à la lassitude de devoir faire face à une nouvelle
reconstruction, comme c'était le cas lors du tremblement de terre
précédent en 1997.
volontaires de la protezione civile |
Dégats à Castellucio |
San Pellegrino |
Quelques commentaires
- tout d'abord notre travail n'a rien à voir avec les activités de déblaiement et de recherche de personnes ensevelies, nous arrivons plus tard et notre rôle est d'aider la population à supporter les conséquences du tremblement de terre: donc pas de rôle glorieux ou on réussit à sortir un survivant des décombres.
- travail fatiguant physiquement, les journées sont longues, il y a beaucoup à faire et le matériel est loin d'être léger (une tente de 6-8 personnes pèse 230 kilos, les tentes gonflables ne peuvent être déchargées que par grue!). Le fait d'avoir à démonter des tentes qui n'ont pratiquement pas été utilisées incite à penser que la protezione civile devrait élaborer des modèles mathématiques pour évaluer au plus juste le nombre de tentes nécessaires en fonction de la population, de l'intensité du tremblement de terre, et autres variables. Ce qui économiserait bien des efforts et des ressources financières.
- travail peu glorieux mais indispensable: mais est-il apprécié de la population?.Il convient d'élaborer sur ce point: lors des cours d'instruction il nous est répété qu'une façon d'aider les sinistrés à retrouver un sens d'utilité consiste à les associer aux travaux de reconstruction comme: cuisine, déblaiement, etc.; cependant j'ai eu la très nette impression qu'ils nous regardent travailler mais ne sont pas disposé à aider. D'une part je les comprends car ils sont traumatisés mais un geste d'aide serait le bienvenu. Une approche pourrait être d'exiger que les "locaux" soient intégrés dans les équipes de la protezione civile?
- lors de nos contacts avec les résidents, on réalise la détresse et le désespoir des survivants qui ont perdus leurs biens et leurs maisons (quand ce n'est pas un parent ou ami) et ne savent pas ce qui va se passer.
- un sentiment de malaise avec les touristes qui « viennent voir » les dégâts.
- les dégâts énormes qui font réaliser la puissance de ces secousses imprévisibles.
- j'étais content de participer à une de ces missions, de mettre en pratique l'entrainement reçu au cours de notre formation et de donner un coup de main aussi petit soit-il à la reconstruction de la zone de Norcia. J'étais encore plus content de voir la fin de cette mission pour me reposer, surtout qu'elle survenait juste après cette dure randonnée VTT dans les alpes la semaine précédente.
fin de mission |
Happy New Year without EARTHQUAKES and other disasters.
ReplyDeleteI really agreed with your recap of the events and think the "protection civile" need to see your comments about the number of tents, difficulty of erection, trying to keep out tourists etc. I think the general apathy that you described was quite normal for a people that were going through for a second time and thinking about how were they going to manage. Look at Aquila, still needing a lot of help! well done, your group did what you could! janina